Enfant
qui marche…
C’est un
enfant qui marche
Il marche
depuis longtemps
Si longtemps
qu’il ne se souvient plus depuis quand…
Depuis que
son père l’a réveillé en pleine nuit
Viens, on
part, on fuit…
L’enfant n’a
pas bien compris
N’a pas eu
le temps de prendre avec lui
Son doudou,
son ami…
Ils sont
partis dans la nuit
Loin de chez
lui
Là où la
guerre sévit
Là où la
guerre détruit
Son père lui
a dit
Tu verras
j’t’emmène au Paradis
L’enfant a
cru son père et a eu moins peur
Sur ses
petites jambes il marche et marche pendant des heures
Il voit que
des gens marchent avec eux
Nombreux
Ils vont,
sans bruit, dans un murmure discret
De routes en
chemins, de sentiers
En pistes
ensablées
Et puis
voilà la mer dans le soleil levant
L’enfant
tient fort la main de ses parents
Il voit
beaucoup d’autres parents
Avec
d’autres enfants
Qui, en
lentes processions désordonnées,
S’entassent
dans un bateau, recroquevillés,
Mâchoires
serrées, regards angoissés…
Quand le
bateau s’en va sur les flots agités
Une rumeur
s’élève, presque joyeuse : sauvés !
L’enfant interroge
son père d’un regard embrouillé
Rassure-toi
mon fils, tu verras bientôt le Paradis…
Mais le
rafiot
Ballotté par
les flots
Tangue
dangereusement
Lutte
désespérément
Jusqu’à ce
qu’une vague plus forte que les autres
Arrache
l’enfant à la main de son père
Un dernier
regard, un dernier cri
Et l’enfant
s’en va…
L’enfant
marche
Il marche
vers le Paradis…